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L’agriculture urbaine tend la main aupublic en difficulté

En région parisienne puis à Marseille, l’association Le Paysan urbain remet en selle des personnes éloignées de l’emploi grâce à la production de micropousses.

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Insérer des publics en difficulté par la formation, ce n’est pas nouveau. Toutes les branches de la filière végétale sont largement concernées, que ce soit en production ou en paysage. En revanche, l’idée d’insérer ces personnes par l’intermédiaire des valeurs de l’économie sociale et solidaire, en se basant sur les produits mis en avant par l’agriculture urbaine et les circuits courts, tout en respectant le plus possible l’environnement, reste en­core relativement novatrice. C’est ce que propose Le Paysan urbain.

Tout a débuté en 2014 en région parisienne, précisément à Romainville (93). Benoît Liotard, rejoint ensuite par trois associés, décide de créer une association visant à « réconcilier les trois piliers du développement durable, le social, l’économique et l’environnemental ». Le support retenu est l’agriculture urbaine, un « moyen de se reconnecter à son alimentation, à la manière dont pousse un légume, d’où il vient, comment il est cultivé, par qui… ». Comme la place manque, le choix de se tourner vers les micropousses, un marché encore méconnu en France mais assez développé dans d’autres pays, est privilégié. Ces jeunes plants issus de semis et récoltés en rotations courtes sont un « concentré d’énergie, de vitamines et de minéraux, bref, de tout ce qui se trouve au final dans les légumes »… et sont surtout de plus en plus recherchés par les restaurateurs et les amateurs d’alimentation saine. Ces micropousses sont donc totalement en adéquation avec le projet de départ.

S’adapter à un sol ingrat

Après la naissance de la première ferme urbaine de Romainville, l’association a essaimé fin 2018 dans le sud de la France, à Marseille (13). La Fondation des apprentis d’Auteuil, qui œuvre à l’accompagnement de public en difficulté, y a hérité d’un ancien couvent, Le Cloître, et y a fondé un « Pôle d’entrepreneuriat solidaire », après une reconversion du site. C’est dans ce cadre que s’in­sère la nouvelle unité de production du Paysan urbain, ainsi qu’un restaurant et d’autres activités, en tout une dizaine d’entreprises.

Benoît Liotard gère aujourd’hui ce site de Marseille, soit un hectare mis en culture. « Nous voulons remettre le pied à l’étrier de gens qui ont eu un accident de la vie, un parcours difficile. Nous les accueillons pendant deux ans, les aidons à résoudre leurs problèmes afin qu’ils puissent se tourner vers un emploi classique. » Pendant ces deux années, les personnes cultivent des micro-pousses. Mais l’association cherche aussi à attirer tous les publics en proposant en parallèle, sur une parcelle attenante au tunnel de culture, des ateliers de jardinage et des carrés d’aromatiques bio. Une manière de plus de croiser les couches sociales pour favoriser l’insertion.

Dans les quartiers Nord de Marseille, l’association travaille sur un sol caillouteux, peu propice. Elle s’en est aperçue dès qu’il a fallu implanter le tunnel de culture ! Mais elle s’adapte, en fabriquant son propre compost, en cultivant des engrais verts ou en travaillant avec du broyat de bois… Sous le tunnel, les personnes en accompagnement réalisent des semis en terrines denses, les passent en chambre de germination, puis les cultivent dans le tunnel le temps de pouvoir opérer les récoltes. Le choix des cultures s’est opéré en fonction des qualités gustatives, soit en tout une douzaine d’espèces au catalogue : pois, moutarde­, etc. Pas moins de trois variétés de radis ont été retenues.

Des contacts ont été établis pour trouver des débouchés à ces cultures dans le domaine de la cosmétique­ et une réflexion est menée pour proposer des jus ou soupes. Mais, pour l’instant, les micropousses sont vendues en barquettes aux restaurants ou aux particuliers, avec deux tailles de contenants, petits et grands, vendus respectivement 2 et 4 euros. Les ventes de produits et de prestations d’ateliers de jardin permettent à l’association de moins dépendre des subventions tout en finançant l’insertion. Six personnes sont déjà passées par la structure marseillaise.

Comme beaucoup d’autres, les cultures du Paysan urbain ont dû être stoppées durant le confinement, mais elles reprennent en cette fin de printemps, avec l’espoir qu’elles puissent vite retrouver leur fonction initiale, l’insertion !

Pascal Fayolle

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